Yann VacherFormateur et chercheur, Université de Corse, France |
Marc ThiébaudPsychologue, animateur, formateur, |
Résumé
Ce texte vise à mettre en perspective deux approches – le groupe d’analyse de pratiques professionnelles et le groupe de codéveloppement professionnel – en s’appuyant sur une expérimentation pratique. Il propose une analyse de leurs similitudes et de leurs spécificités. Cette mise en perspective met plus particulièrement en évidence les aspects relevant du cadre et des principes, du déroulement de chaque démarche, de la place de l’analyse et de l’action, de la manière dont les apprentissages sont conçus et favorisés ainsi que du développement de la dynamique de groupe et d’intelligence collective. Il discute par ailleurs de la complémentarité des deux approches et des bénéfices et risques qui peuvent découler d’une intégration des apports de chacune d’elles.
Mots-clés
apprentissages, analyse et action, intelligence collective, méta-analyse, codéveloppement
Catégorie d’article
Synthèse et mise en perspective
Référencement
Vacher, Y. et Thiébaud, M. (2020). Groupes d’analyse de pratiques et de codéveloppement professionnel : mise en perspective. In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, No 18, pp. 86-116 et Le Codéveloppeur, Vol. 6 no 3. http://www.analysedepratique.org/?p=3756 et https://www.aqcp.org/wp-content/uploads/6.-vacher-thiebaud-revue-app-16juin2020.pdf.
Article en PDF Commentaires
Practice analysis and professional codevelopment groups: putting things into perspective
Abstract
This text aims to put into perspective two approaches – the professional practice analysis group and the professional codevelopment group – based on practical experimentation. It proposes an analysis of their similarities and their specificities. More specifically, this perspective highlights aspects relating to the framework and principles, the way each approach is carried out, the place of analysis and action, the way learning is designed and promoted, and the development of group dynamics and collective intelligence. It also discusses the complementarity of the two approaches and the benefits and risks that can result from integrating the contributions of each.
Keywords
learning, analysis and action, collective intelligence, meta-analysis, professional codevelopment
Introduction
La mise en perspective des démarches de groupe de codéveloppement professionnel (GCP) et d’analyse de pratiques professionnelles (APP) en groupe proposée dans le présent texte s’appuie sur une expérimentation et un dialogue élaborés avec huit personnes en 2019 (voir Thiébaud, 2020 ; Thiébaud, Vacher, Champagne & Desjardins, 2020). Elle porte sur les approches spécifiques utilisées dans le cadre de notre étude : pour le GCP, il s’agit de la démarche élaborée à l’origine par Payette & Champagne (1997) ; en ce qui concerne l’APP, l’approche utilisée met l’accent sur l’accompagnement, l’intelligence collective et la réflexivité (voir Thiébaud, 2013 ; Thiébaud & Vacher, 2020).
Figure 1 : points saillants de notre mise en perspective des deux démarches
En lien avec chacun de ces éléments, nous discuterons aussi des apports mutuels de chaque démarche ainsi que des risques et bénéfices potentiels de ces apports.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il nous apparaît pertinent de préciser quelques aspects de l’expérimentation menée (voir Thiébaud, 2020). Celle-ci a été réalisée en 2019 en quatre temps :
- conception de l’expérimentation en collaboration entre deux praticiens du GCP (Michel Desjardins et Claude Champagne) et deux animateurs de groupes d’APP (Marc Thiébaud et Yann Vacher) ;
- mise en œuvre successivement d’une séance de GCP et d’une séance d’APP avec un groupe de huit personnes;
- dialogue entre ces huit personnes sur les vécus de chaque séance ;
- discussion et mise en perspective des deux démarches entre les quatre concepteurs.
Le codéveloppement professionnel a été animé par Claude Champagne selon l’approche conçue par ses initiateurs (voir Payette & Champagne, 1997) inspirés particulièrement par les travaux de Lewin (1948) en dynamique de groupe et science-action, de Revans (1982) en action learning, de Rogers (1968) en démarche centrée sur le client et de St-Arnaud (2003) en praxéologie.
L’approche du codéveloppement est restée relativement unifiée depuis sa genèse, même si des différences sont apparues au cours de la dernière décennie (Champagne, 2020). L’animation a permis la mise en place d’un cadre visant à favoriser la confiance et l’ouverture à l’apprentissage. Elle a été assurée avec souplesse, laissant de la place aux propositions des consultants/participants (ce qui a permis des analyses supplémentaires par rapport à la pratique habituelle).
Parmi les différentes formes d’APP, celle qui a été choisie et animée par Marc Thiébaud a mis l’accent sur les aspects d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité. Cette approche privilégie un travail collectif et réflexif qui favorise la multiplicité des lectures et subjectivités, le partage des ressources et compréhensions ainsi que l’apprentissage et le questionnement de toutes les personnes présentes dans le groupe (voir Thiébaud, 2013 ; Vacher, 2018 ; Thiébaud & Vacher, 2018).
Elle est inspirée par des auteurs et intervenants tels que Rogers et le courant de la psychologie humaniste (1968) ; Morin (2005) et Bateson (1995) pour leurs travaux sur la complexité et la systémique ; et encore Schön (1983), Argyris & Schön (2002) et Kolb (1984) concernant la réflexivité et les apprentissages expérientiels, entre autres.
Les lecteurs trouveront en annexe une présentation synthétique des éléments clés de l’approche utilisée, qui est exposée plus en détail dans Thiébaud et Vacher (2020)[1].
Compte tenu de la très grande diversité de pratiques qui peut être observée en APP, il faut donc souligner que la mise en perspective du GCP et de l’APP produirait des résultats différents avec une autre approche de l‘APP.
Nous reviendrons plus en détail sur certains de ces aspects dans les lignes qui suivent au fur et à mesure que nous comparerons les démarches du GCP et de l’APP. Nous utiliserons pour simplifier le terme d’APP, étant entendu que nous nous référerons à chaque fois à de l’analyse de pratiques développée dans une perspective d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité. Précisons encore que les éléments présentés se fondent sur une « pratique stéréotypée » de l’une et l’autre des approches. En séance, les ajustements effectivement produits et les styles d’animation relèvent de dosages singuliers et contextualisés. La « mise en case » que nous opérons par la suite dans le texte ne peut rendre compte de cette réalité.
Ce texte n’aurait pas pu être produit sans les riches échanges développés avec Claude Champagne et Michel Desjardins et leurs regards avisés. Nous les en remercions vivement.
1. Le dispositif général, les principes et les objectifs
Nous commençons cette mise en perspective de la manière la plus courante qui consiste à considérer les aspects du dispositif sur un plan plutôt formel. Ce sont d’ailleurs ces aspects qui ont été à chaque fois explicités et clarifiés à l’avance dans l’expérimentation des deux approches (voir Thiébaud, 2020c).
Il apparaît tout d’abord que, quels que soient les termes utilisés (par exemple « exposant » ou « client » ; participants ou consultants), la structuration du travail est identique en ce qui concerne l’organisation des rôles et le contrat de fonctionnement général.
Les règles de groupe sont similaires (confidentialité, respect des personnes, bienveillance, attention à l’autre, écoute active).
Il en va de même concernant les principes sur lesquels repose chaque démarche : travail sur un vécu et une pratique professionnelle, contractualisation avec le groupe, dynamique d’élaboration en collectif, prise de recul par chacun sur les apprentissages réalisés, posture accompagnante de l’animateur et des participants, accueil et empathie à l’égard de l’exposant/client , mobilisation des ressources et des savoirs d’action de chacun, alternance dans les rôles d’exposant/client et de participant/consultant d’une séance à l’autre (voir Thiébaud & Vacher, 2020 et Champagne, 2020).
Pour ce qui est des objectifs visés, ils sont variés et peuvent relever globalement de la construction identitaire, de la recherche et de l’amélioration du bien-être comme de l’accroissement de l’efficacité professionnelle. Ils peuvent viser la construction d’un savoir analyser et l’explicitation des savoirs tacites. Ils s’inscrivent dans une perspective de développement professionnel allant de l’élaboration d’une pratique réflexive à la recherche de nouvelles possibilités d’action. En GCP, l’accent est davantage mis sur l’évolution de la pratique par l’élaboration d’un projet d’action.
Le tableau suivant résume les principales similitudes et différences entre les deux démarches. Il met en lumière en particulier que sur les aspects précités, aucune différence notable n’est à relever selon nous, si ce n’est au niveau de certains accents des objectifs. A noter que seuls les éléments les plus significatifs sont ici mis en avant. Nous tenons aussi à souligner que ce tableau (et les suivants) n’est pas exhaustif ; nous avons ainsi laissé en bas une ligne libre (« … ») pour inviter les lecteurs à le compléter par leurs propres analyses.
Dispositif général, principes et objectifs
Similitudes | Différences | |
Structure et rôles |
Contractualisation de la démarche générale Travail en groupe Trois rôles : exposant/client, participants/consultants et animateur Alternance des rôles d’une séance à l’autre |
|
Cadre, principes |
Règles de fonctionnement Travail sur un vécu et une pratique professionnelle Invitation à une prise de recul de chacun sur les apprentissages réalisés |
|
Objectifs et finalités | Soutien au développement professionnel de tous les membres du groupe (avec priorité au client / à l’exposant)Développement d’apprentissages |
GCP : accent sur l’efficacité professionnelle APP : accent sur le développement de la capacité réflexive |
… |
Tableau 1 : similitudes et différences concernant dispositif général, les principes et les objectifs
2. Déroulement par étapes
2.1 Déroulement des deux démarches : similitudes et différences
Au niveau de la mise en place du travail en début de séance, on peut mentionner certaines similitudes et différences. Cela concerne le choix de l’exposant ou du client et de ce qu’il va apporter au groupe (préoccupations, situation problème, projet, etc. en lien avec un aspect de la pratique professionnelle). Dans le GCP, ce choix est souvent fait avant la séance, ce qui permet au client (et éventuellement à l’animateur), de se préparer. C’est plus rarement le cas en APP.
Différents critères peuvent être utilisés : la motivation pour être exposant ou client, le degré d’actualité (voire d’urgence) de la situation proposée au groupe, l’intérêt ou les résonances que peuvent y trouver les participants, une alternance par rotation, etc.
En ce qui concerne les étapes du déroulement proposé par chaque démarche, elles nécessitent un examen plus détaillé. Dans l’expérimentation, nous y avons à chaque fois porté une attention particulière, notamment en le présentant à l’avance et en explicitant clairement la transition entre chacune des étapes (voir tableau ci-après construit sur les éléments exposés dans Thiébaud & Vacher, 2020 et Champagne, 2020).
Nous avons constaté qu’au-delà des différences présentes entre les deux approches, chaque participant a pu globalement s’y retrouver au fil des étapes suivies.
Tableau 1 : déroulements proposés pour une séance d’analyse de pratiques (APP) selon une approche d’accompagnement, de réflexivité et d’intelligence collective et pour une séance de codéveloppement professionnel (GCP)
APP | GCP |
Etapes | Caractéristiques | Etapes | Caractéristiques |
A) En début de démarche
Mise en place de la démarche générale |
Constitution du groupe – « contrat » Détermination des règles de fonctionnement |
Mise en place de la démarche : adoption d’un contrat de groupe, partage d’objectifs individuels | Démonstration par une session de sensibilisation -préparation des participants à leurs rôles de client et de consultant |
B) Avant la séance
Préparation personnelle des participants | Réflexion sur ses besoins (apprentissages et demandes) et sur le groupe (où en est-on ?) |
Identification du client Préparation personnelle du client et échange avec l’animateur |
Préparation écrite d’un exposé (recommandée mais non obligatoire) |
C) En début de séance
Tour de table : quels sont les besoins du jour pour chacun des participants ? | Échanges pour renouer les liens Identification et tri des attentesChoix de l’exposant |
Tour de table et confirmation du choix du participant qui sera client | Activité d’inclusion, retour sur la séance précédente, partage des intentions d’apprentissages |
D) Pendant une séquence de travail de groupe avec un exposant ou un client
1. Cadre général Quelle question exposée ? |
Clarification de la demande Vérification de sa pertinence Accord / contrat |
1. Exposé du sujet par le client | Mise à disposition d’informations par le client (qui expose et s’expose) |
2. Présentation de la pratique Que se passe-t-il ? |
Apport par l’exposant de faits et de vécus Questions par les participants (sans faire part d’analyses) |
2. Clarification de la problématique ou du projet |
Questions d’information (problème, contexte, personne) Questions d’exploration par les consultations et réponse par le client (sans proposition d’actions) Explicitation de l’implicite |
3. Analyse Comment comprendre ce qui se passe ? |
Analyses, hypothèses de compréhension par les participants Questionnement en commun, ouverture de différents angles de vue Retour de l’exposant |
3. Contrat de consultation | Lecture de la compréhension et de la demande par les participants. Formulation de la demande et des attentes du clientContrat défini par le client |
4. Mise en perspective Quelle synthèse ? |
Partage de liens Réflexions « méta » Apprentissages développés durant l’analyse (sans débat ni recherche de consensus) Retour de l’exposant |
4. Partage : réactions, commentaires, suggestions, partage d’expérience | Communication par les consultants de ce qui peut aider le client qui écoute (en lien avec les besoins définis) sans débat entre eux |
5. Options, pistes d’action (facultatif) Qu’est ce qui peut être fait ? |
Définition d’objectifs par l’exposant Recherche en commun de différentes pistes d’action et d’évolution de la pratique Retour de l’exposant |
5. Synthèse et projet d’action(s) |
Tri, réactions, formulation d’hypothèses d’actions concrètes, réalisables à court terme par le client qui s’engage à l’action) |
6. Bilan et prolongements Quels Comment ont été vécus les échanges ? |
Partage de vécus et apprentissages par tous Parfois : prolongements (p. ex. partage sur des liens possibles entre les pratiques) |
6. Conclusion : évaluation et intégration des apprentissages par chacun des participants |
Expression de l’appréciation, des apprentissages et des applications envisagées par tous les participants, incluant l’animateur Régulation du groupe |
Autres aspects plus transversaux
Un retour à la demande de l’exposant est fait régulièrement (pour un ajustement si celle-ci évolue). Des temps « méta » plus ou moins brefs ou longs, individuels ou collectifs, peuvent être introduits à différents moments. |
À tout moment, des temps d’arrêt sont permis pour porter un regard méta sur ce qui est en train de se produire au sein du groupe ou pour recadrer des interventions. |
E) Après la séance
Mise en œuvre d’actions Réflexions personnelles
|
Expérimentation Réflexions, mises en perspectiveParfois : prolongement des réflexions, échanges informels |
Expérimentation et mise en œuvre d’actions | Poursuite du travail et réalisation des actions par le client et les participants |
F) Lors d’une séance ultérieure (après le développement de réflexions et la mobilisation d‘actions éventuelles)
Suivi d’actions : retour d’information Parfois : nouvelle demande |
Partage par l’exposant des réflexions et actions développées dans l’entre-séance. Liens, prolongements Renforcement des acquis Parfois : nouvelle séquence si demande de l’exposant. |
Retour d’information à propos des actions entreprises
|
Généralisation des apprentissages |
G) A la fin de l’ensemble de la démarche (après plusieurs séances)
Bilan de l’ensemble : qu’est-ce qu’on en retire ?Conclusion et séparation du groupe |
Partage de feed-back sur toutes les dimensions du vécu : sens – implication – relations – organisation – animation – résultats, apprentissages |
Bilan personnel, de groupe et, dans certains cas, organisationnel | Appréciation de l’évolution des participants dans leurs apprentissages en lien avec leur pratique, leurs objectifs et le fonctionnement en GCP |
Tableau 2 : déroulement des démarches d’APP et de GCP proposées
Il apparaît à l’examen de ce tableau qu’il est possible de mettre en regard chacune des étapes des deux démarches. On observe qu’elles s’ordonnancent de manière similaire, même s’il y a décalage à un moment ou un autre au niveau de leur numérotation. Cependant, des différences apparaissent, principalement dans :
- les modalités de choix de la pratique travaillée, en début de séance ;
- la nature et la place des (re)contractualisations faites durant la séance ;
- la durée et l’importance des étapes consacrées à l’analyse et à la formulation de pistes d’action (nous y reviendrons plus loin dans le point 3).
Le tableau suivant résume les principales similitudes et différences entre les deux démarches.
Déroulement des étapes dans les deux démarches
Similitudes | Différences | |
Structuration des étapes |
Démarrage par la présentation d’une pratique Étape d’échange et de clarification sur cette dernière Etape de prise de recul sur les vécus de la séance et les apprentissages réalisés |
GCP : préparation de la présentation avant la séance GCP : Contractualisation formelle à l’étape 3 avec le client APP : accueil/clarification de la demande de l’exposant et contractualisation initiale, puis au fur et à mesure durant la séance GCP : partage de commentaires, échos, éclairages et pistes d’action dans une seule et même étape (étape 4) APP : partage des analyses et hypothèses de compréhension dans une étape 3 différenciée, puis mise en perspective ainsi qu’éventuelles pistes d’action dans des étapes séparées GCP : formulation systématiquement par le client d’un projet d’action concret en étape 5 (facultatif en APP) |
Flexibilité | Durées des étapes régulées en fonction des besoins et de la progression du groupe | |
Rôle de l’animateur |
Facilitation de la mise en œuvre de chaque étape Posture accompagnante de l’animateur, qui facilite les processus mais intervient peu ou pas sur les contenus Régulation au service du groupe |
|
… |
Tableau 3 : similitudes et différences au niveau du déroulement par étapes
2.2. Discussion : complémentarités, risques, bénéfices potentiels qui peuvent découler d’une intégration des apports mutuels de chaque démarche
En ce qui concerne les différences, il ressort deux éléments principaux[2] de cette comparaison des spécificités au niveau des aspects formels et du déroulement :
- l’APP différencie davantage les étapes de partage des éclairages et analyses produites au sein du groupe ;
- le GCP spécifie plus en détail la démarche de contrat entre client et participants / consultants, en mettant l’accent sur des résultats en termes d’efficacité.
De ce fait, les complémentarités entre les deux approches apparaissent avant tout dans la valorisation de ces éléments. Ainsi, il est possible d’envisager des hybridations entre ces déroulements afin de tirer bénéfice de ces différences. Par exemple, cela pourrait impliquer :
- Pour l’APP : de développer les aspects de contractualisation avec l’exposant pour clarifier son engagement dans l’analyse et l’évolution de sa pratique et s’assurer de la cohérence des apports du groupe à cet égard (incluant l’élaboration d’un lien plus explicite avec les retours sur l’action que pourrait faire l’exposant).
- Pour le GCP : de développer les aspects d’analyse, par exemple la formulation d’hypothèses de compréhension, en amont de la production de pistes d’action (laquelle s’en trouverait étayée plus finement[3].
Nous pouvons déjà relever que de tels développements sont susceptibles d’enrichir chacune des démarches. Il en découlerait également, pour l’animateur et le groupe intéressés à travailler avec ces éléments, la possibilité de procéder à des variations dans le déroulement, en tenant compte des demandes et besoins ainsi que des capacités présentes. Une limite de telles hybridations réside dans la nécessité pour l’animateur de bien en identifier (et contractualiser avec tous, à commencer par l’exposant/client, puis avec les autres participants) les objectifs de manière à ce qu’ils s’inscrivent clairement dans la cohérence globale de la démarche et de ses principes éthiques. Relevons également la nécessité que ces objectifs et les modalités choisies soient adaptés aux participants et à l’évolution du groupe dans le temps. Ces variations peuvent par exemple gagner à être introduites progressivement.
D’autres éléments pourraient être valorisés à partir de la comparaison de ces démarches. Ainsi, en APP, une préparation écrite, plus ou moins systématique, du récit en amont de la séance favoriserait un travail préalable de l’exposant et permettrait une analyse ultérieure de cette préparation, en tant que composante de sa pratique. Avec l’inconvénient d’une certaine perte de spontanéité dans l’expression.
Nous avons vu les spécificités de chaque démarche en lien avec le cadre et le déroulement qu’elles proposent. Cependant, leurs particularités vont au-delà de ces aspects plus ou moins formels. Elles résident aussi dans des aspects plus dynamiques que nous explorons dans les points suivants
3. La place donnée à l’analyse et à l’action (ainsi qu’à leur complémentarité)
3.1. Nature et forme de la place donnée à l’analyse et à l’action : similitudes et différences
L’APP et le GCP mettent au centre le travail sur les pratiques de l’exposant/client et des participants. Ces pratiques sont faites de représentations, de croyances, de valeurs, de vécus affectifs, de savoirs professionnels, d’actions, etc. Les deux approches s’intéressent donc, mais à des degrés et sous des angles différents, aux actions des participants, afin de mieux les comprendre et/ou les enrichir selon la finalité visée : accompagnement, formation, compréhension, résolution, etc. Quels que soient les objectifs, un accent est mis, dans le GCP comme dans l’APP, sur l’information et la compréhension lors des phases d’écoute et de questionnement de l’exposant ou client.
La différence principale est liée à la place et à l’importance plus ou moins grande des étapes consacrées à l’investigation, à l’analyse du récit et de la pratique par rapport à celles allouées à l’élaboration de projets et pistes d’action. Cette différence renvoie directement aux finalités privilégiées dans chaque démarche. Ainsi, dans une visée développementale (comprendre, se construire), le temps d’analyse serait priorisé, et dans une orientation pragmatique (agir, transformer son action), l’accent privilégié serait celui de l’action. Ces deux orientations ne s’opposent pas. Elles se positionnent en complémentarité potentielle.
Notons que dans le GCP, si le regard se tourne plus qu’en APP vers le projet d’action, ceci est fait dans une optique « solution » et non résolution de problème, en ce sens que c’est le pouvoir d’agir de l’individu qui est encouragé. Cette approche se fonde en effet sur l’idée qu’il n’est pas nécessaire de connaître la cause profonde ou la fonction d’un symptôme pour le résoudre : il importe d’inciter le client à « faire quelque chose », de trouver un filon vers un changement positif et de le soutenir.
En conséquence, en GCP comme en APP, l’analyse et l’élaboration de projets action explorent les « comment » plutôt que les « pourquoi ». Les « pourquoi », qui cherchent des explications à une situation actuelle, comportent le risque de conduire à des justifications, ce qui n’est pas le but visé. En revanche, un questionnement sur le « pour quoi » (en deux mots) permet de s’interroger sur le sens, sur les enjeux de l’acteur. Cependant, les « comment » s’appuient davantage sur une enquête partant d’un travail de description, de documentation, d’exploration et d’explicitation des vécus et de la pratique (correspondant à la question « comment cela se passe ? »). Puis, le travail se poursuit vers la mise en lien, la prise de recul de ceux-ci (« comment comprendre ? ») et des futurs possibles (« comment agir ? »)
Le tableau suivant reprend les principales similitudes et différences selon plusieurs indicateurs.
Place donnée à l’analyse et à l’action dans les deux démarches
Similitudes | Différences | |
Données pour l’analyse et l’élaboration d’actions | Les vécus et la pratique, qui sont décrits et explorés, et qui constituent la base pour l’analyse et la recherche de nouvelles perspectives d’action | |
Place donnée à l’analyse |
Présente systématiquement dans les deux démarches (plus forte cependant en APP) |
GCP : étape 4 consacrée à la mise en commun de tout ce qui peut aider le client, à sa demande (réactions, réflexions, suggestions d’actions, etc.) APP : étape 3 entièrement dédiée à l’analyse dans une logique de compréhension APP : étape 4 consacrée à une mise en lien des analyses développées |
Place donnée à l’action |
Présente comme élément de la pratique analysée (plus forte cependant en GCP)Réinvestissement des fruits du travail collectif par les participants dans leur pratique |
GCP : globalement dans toute la démarche qui inclut l’inter-séance. Plus spécifiquement dans l’étape 4 (partage de pistes d’action) et l’étape 5 (formalisation d’un projet d’action par la personne cliente) APP : étape 5 de partage de pistes d’action facultative (selon la demande de la personne exposante) |
Complémentarité de l’analyse et de l’action | Mise en lien lors de l’étape de l’étape 6 de bilan |
GCP : mise en lien parfois des éléments d’analyse et des pistes d’action APP : mise en lien possible dans l’étape 4 et systématique dans l’étape 5 |
Rôle de l’animateur |
Encourage la recherche et le partage dans le groupe de nouvelles compréhensions en lien avec la pratique (dont l’action) de l’exposant ou client Favorise des échanges qui aident à mieux comprendre et possiblement mieux agir |
GCP : sollicite explicitement le client pour formuler un projet d’action (étape 5), dont il sera fait retour à la prochaine rencontre APP : prend en compte la demande de l’exposant pour la mise en œuvre ou non de l’étape 5 (pistes d’action), en concertation avec le groupe APP : ajuste, de moments en moments, la place donnée à l’analyse et à l’action en fonction des potentialités d’apprentissage et de développement du groupe |
Travail inter-séance | Favorise la maturation possible des analyses et projets d’action | GCP : engage le client dans la mise en place de son plan d’action |
… |
Tableau 4 : similitudes et différences dans la place donnée à l’analyse et à l’action
3.2. Discussion : complémentarités, risques, bénéfices qui peuvent découler d’une intégration des apports mutuels de chaque démarche
Si les enjeux de l’analyse et de l’action peuvent apparaître comme différents, voire contradictoires, il est profitable, judicieux d’en envisager une potentielle complémentarité. Il est en effet possible que l’analyse puisse être au service de l’action, ou plus exactement d’un projet d’action, qui lui-même peut être objet d’analyse. L’analyse peut ainsi être considérée comme un moyen de « préparer » à l’action. De manière similaire, les réflexions sur les pistes d’action peuvent être vues comme une matière à analyser : parfois une suggestion (orientée vers l’action) peut susciter de nouvelles réflexions dont le groupe « s’empare » pour relancer son cheminement d’analyse. De tels développements peuvent se faire selon les demandes du client ou de l’exposant et être contractualisés avec le groupe. Ils concernent et stimulent, en fin de compte, la capacité à mettre en œuvre, de façon continue, le cycle action-réflexion et réflexion-action.
La complémentarité des deux orientations (vers l’analyse et vers l’action) peut être utilisée de manière à tenir compte des caractéristiques des participants et des demandes du client. Ainsi, dans une logique d’apprentissage expérientiel, il est utile de prendre en considération par exemple des capacités ou sensibilités présentes dans le groupe en lien avec l’opportunité de favoriser plutôt un travail d’introspection sur le vécu ou de modélisation ou d’élaboration de pistes d’action. Une telle perspective permet, en fonction des objectifs poursuivis, de valoriser tantôt un passage par l’action pour arriver à l’analyse et tantôt un cheminement inverse.
La place respective de l’analyse et de l’action peut être décrite selon quatre configurations – types :
- l’analyse au service de l’action,
- l’action au service de l’analyse,
- une indépendance des deux processus,
- une boucle de réciprocité (interdépendance) dans laquelle l’action nourrit la réflexion et la réflexion nourrit l’action.
Si la quatrième configuration paraît la plus riche dans une logique d’apprentissage expérientiel, des interférences négatives pourraient cependant surgir si les pistes d’action sont proposées dans une même étape que le développement de l’analyse. Le souci d’élaborer des solutions serait potentiellement parasitant si par exemple certains participants orientent leurs interventions vers cette visée d’action alors que d’autres explorent encore la compréhension des éléments apportés par l’exposant ou le client. La maturation et l’ouverture de l’analyse à des angles multiples pourraient s’en trouver réduites dans la mesure où l’élaboration de pistes d’action viendrait interrompre un processus d’exploration fructueux. Cette situation nous paraît susceptible de se manifester particulièrement lorsque l’objet d’analyse est un problème et que la demande de l’exposant ou du client (comme la tendance des participants dans le groupe) conduit à penser qu’il faut apporter une solution sans élucider, avec la personne accompagnée, ce qui maintient par exemple le problème. Le collectif, dans ce cas, risque de ne pas identifier les modes de pensée, les logiques d’action ou les systèmes d’interaction qui peuvent contribuer à la situation. Les idées de solution, inscrites dans une vision potentiellement réductrice, pourraient dès lors ne pas atteindre le but visé (voire renforcer le problème).
A contrario, une déconnexion complète des deux dynamiques pourrait conduire aux risques suivants :
- une boucle de l’analyse qui ne débouche jamais sur l’action ni ne permet la transformation ou le développement du professionnel ;
- une boucle de l’action (enfermée sur elle-même), qui conduit à divers ajustements des actions sans réflexion sur les cadres de référence et les logiques qui guident l’action : l’apprentissage reste au niveau 1 décrit par Bateson (1995) et Argyris & Schön (2002). Il y a production de régulations des actions mais de façon non évolutive ni transformative.
4. La manière dont les apprentissages sont conçus et favorisés dans les deux démarches
4.1. Formes et leviers d’apprentissage : similitudes et différences
Dans les deux démarches (GCP et APP), l’apprentissage se fonde sur un « dialogue entre deux vécus » : le vécu de la pratique de chacun et celui du travail élaboré par le groupe d’analyse/codéveloppement. De ce fait, les apprentissages développés diffèrent de ceux présents dans les modèles transmissifs ou comportementalistes. En effet, le contenu des apprentissages est a priori indéterminé puisque dépendant des objets de travail (la pratique analysée d’une part et les objets émergents dans les échanges d’autre part). Les modèles de l’apprentissage expérientiel se fondant sur un cycle qui lie réflexion et action (Kolb, 1984) apparaissent ainsi comme les plus à même d’éclairer les dynamiques présentes dans le GCP comme dans l’APP. Notons que la nature des objets d’apprentissage est très hétérogène. Il peut en effet s’agir d’éléments de communication, de savoirs d’action, de grilles de lecture, de connaissance de soi, de stratégies et modèles d’action, etc.
Plusieurs leviers et formes d’apprentissage sont susceptibles d’être activés en APP ou en GCP. Nous pouvons évoquer notamment les quatre suivants :
- Activation du cycle expérientiel: l’alternance et la complémentarité entre 1) les vécus de la pratique, 2) leur observation – conscientisation – verbalisation, 3) leur conceptualisation – modélisation et 4) la planification pour l’expérimentation de nouvelles actions permet d’activer les apprentissages. Ceux-ci se valident et s’ancrent à la fois dans le temps des séances et entre les séances.
- Réflexion et réflexivité: les apprentissages peuvent se déclencher et s’entretenir par l’émergence, l’acceptation et l’analyse des réactions cognitives (consonances, dissonances) et affectives (résonance, plaisir, contrariété) qui mobilisent la mémoire (sensorielle, émotionnelle, etc.) et favorisent la qualité de l’apprentissage. A un premier niveau, une activité de réflexion (Vacher, 2014, 2015) permet une élaboration des perceptions réactives. A un second niveau, la réflexivité permet une prise de distance « méta » correspondant à un saut qualitatif. Selon Bateson (1995) ou Argyris & Schön (2002), l’acteur peut ainsi identifier ses schèmes d’action, modifier ses cadres de référence et développer de l’apprendre à apprendre (apprentissage de deuxième ordre).
- Mutualisation et co-construction d’éclairages, de grilles de lecture, de pistes d’action: par le jeu de l’altérité dans le groupe, des décalages offrent une opportunité de prise de conscience de la multitude d’angles d’analyse et de références possibles. Chaque « autre » devient ainsi un miroir de tous les possibles non explorés qui permettent de prendre du recul et d’envisager de sortir de ses cadres personnels d’interprétation. A un premier degré, le processus de partage permet un enrichissement, par mutualisation ou apposition des apports de chacun (Vacher, 2018). A un second degré, les échanges peuvent conduire, par co-construction, à des analyses inédites et des apprentissages émergents. Selon la théorie socio-constructiviste du développement (Vygotski, 1997), on peut non seulement apprendre davantage à plusieurs mais on peut encore construire ensemble ce qu’aucun des apprenants ne savait initialement. De tels processus nécessitent des conditions favorables, notamment en termes de communication et dynamique de groupe (Vacher, 2018), sur lesquelles nous reviendrons dans le point 5.
- Inscription dans une continuité temporelle: les apprentissages sont de l’ordre du développement. Ils sont continus et spiralaires. Ils ne sont pas seulement liés à une séance, ils s’inscrivent dans les temps diffus de l’expérience. Autrement dit, ils sont difficilement déclinables en une série d’échéances et d’objectifs. C’est le travail de rétrospection qui permet d’en saisir la chronologie et le processus. En ce sens, l’activité professionnelle est tout autant constructive que productive[4].
Par ailleurs, dans un groupe d’APP comme de GCP, ces apprentissages peuvent être vécus de manières diverses d’un participant à l’autre. Il est à noter également que la personne qui est exposante/cliente est impliquée différemment, même si tous les participants/consultants sont simultanément en apprentissage, dans la mesure où ils élaborent des liens avec leurs propres pratiques ainsi qu’avec les processus de groupe à l’œuvre. Dans la durée, par l’alternance d’une séance à l’autre, tous les membres du groupe ont l’occasion d’être client/exposant, de s’apporter un accompagnement réciproque et de développer leurs apprentissages dans les différents rôles.
Formes et leviers d’apprentissage dans les deux démarches
Similitudes | Différences | |
Leviers d’apprentissage |
Développement de réflexions à partir des perceptions Recherche de réflexivité Intégration dans le cycle d’apprentissage expérientiel Travail de mutualisation |
GCP : apprentissages en lien avec l’action et les pistes de solution aux problèmes APP : travail spécifiquement dédié à une mobilisation de la réflexivité APP : élaboration en co-construction et intelligence collective (voir plus bas sous 5.1) |
Moments d’apprentissage |
Présents sous forme diffuse dans toutes les étapes et dans l’inter- et l’après-séance Inscrits dans une continuité développementale dépassant la séance Matérialisés dans une étape 6 en fin de séance consacrée à une prise de recul sur ceux-ci |
GCP : partage systématique par les participants des apprentissages réalisés (étape 6)GCP : parfois arrêt réflexif entre les étapesGCP : retour systématique, lors d’une séance ultérieure, sur les apprentissages et actions élaborés entre les séancesAPP : présence de temps « méta », au fil de la séance, permettant la conscientisation, le développement et le partage de certains apprentissagesAPP : parfois, retour lors d’une séance ultérieure sur les apprentissages développés |
Qui est en travail (exposant/client et autres participants /consultants) |
Tout le monde, avec des degrés d’implication variables Client/exposant et autres participants invités à exprimer leurs apprentissages à des moments distincts Groupe qui accompagne le client/exposant en lien avec la situation ou la pratique apportée, laquelle représente un objet central de travail en commun |
GCP : étape 6 explicitement dédiée à la formulation et à la mise en commun des apprentissages réalisés par tous les membres du groupeAPP : à différents moments, processus explicitement au service d’un accompagnement mutuel et des apprentissages à la fois individuels et collectifs (temps « méta », régulations de groupe, etc.) |
Manière dont les membres du groupe développent les apprentissages |
Multiplicité de formes et supports d’apprentissages (oralité, écriture, prise de parole, écoute, échanges, introspection, réflexivité, etc.) Complémentarité entre les moments d’écoute et de prise de parole |
|
Objets d’apprentissage | Variés, d’ordres et de domaines différents : l’analyse, l’action, la communication, le développement professionnel, etc. |
GCP : accent sur les actions, projets et logiques d’action mobilisées (non exclusivement ; voir plus haut sous 3.1) APP : accent sur les schèmes de représentation, grilles de lecture, cadres de référence utilisés et sur la manière dont les apprentissages se font |
Rôle de l’animateur | Facilite les apprentissages et les temps pour leur conscientisation et verbalisation |
GCP : favorise les apprentissages en mutualisation APP : favorise les apprentissages en mutualisation et |
Préparation des participants / consultants |
Pas d’apprentissages préalables ou de pré requis avant le début du groupe
Apprentissage expérientiel en cours de séances |
|
… |
Tableau 5 : similitudes et différences dans les formes et leviers d’apprentissage
4.2. Discussion : complémentarités, risques, bénéfices qui peuvent découler d’une intégration des apports mutuels de chaque démarche
Plusieurs complémentarités « dans les deux sens » peuvent être évoquées concernant les apprentissages. Notamment :
- Pour le GCP : le développement plus systématique et approfondi de moments de réflexivité, avec l’intégration de temps « méta » comme en APP, serait susceptible de favoriser des apprentissages de second niveau (Bateson, 1995). L’usage de tels temps en codéveloppement pourrait ainsi préparer, amplifier ou compléter par exemple les apprentissages verbalisés lors de l’étape 6.
- Pour l’APP : les démarches d’apprentissage pourraient gagner à se « confronter » à l’exigence de formulation de pistes d’action pour réinterroger la portée opérationnelle et pragmatique des apprentissages liés à l’analyse (telle que développée en GCP).
Comme nous l’avons vu précédemment (voir 2.2 et 3.2) pour les hybridations possibles entre les éléments de chacune des démarches, la limite se situe dans l’adéquation de tels enrichissements par rapport aux besoins, demandes et profils évolutifs des participants et du groupe. Pour optimiser les apprentissages réflexifs, il est possible de privilégier la régulation, en concertation avec l’ensemble des participants. Celle-ci passe notamment par l’explicitation des moments d’apprentissage et des accents portés sur différents objets de réflexion. Ces échanges régulateurs peuvent aussi constituer des occasions de développement et d’intégration. Les apprentissages seraient alors d’un second niveau car portant sur les apprentissages eux-mêmes, leurs objets et leur régulation. Lors de nos expérimentations, nous avons constaté que la durée contrainte des séances était souvent un facteur limitant de ce passage aux apprentissages d’un second ordre. La réduction, voire l’absence des étapes de méta-analyse et de bilan (étape 6) en est une cause assez fréquemment évoquée en GCP. De telles ouvertures pourraient être favorisées, en fonction des intérêts des participants, dans des groupes ayant acquis une certaine maturité au fil du temps, qui est liée notamment à la dynamique collective. C’est sur ce quatrième aspect que nous développerons encore ci-après notre mise en perspective du GCP et de l’APP.
5. Le développement de la dynamique de groupe et de l’intelligence collective
5.1. Place et nature des dynamiques de groupe et d’intelligence collective : similitudes et différences
Le GCP comme l’APP mobilisent les ressources du collectif. Ainsi, les dynamiques de groupe, et d’intelligence collective (IC ; voir ci-après) qui sont susceptibles d’en émerger, sont favorisées par plusieurs éléments. Ceux qui ont été étudiés dans les parties précédentes (déroulement de la démarche, modalités d’apprentissage, place de l’analyse et de l’action) agissent ainsi fortement sur les dynamiques de groupe. Nous présenterons à titre d’exemple deux de ces interdépendances potentielles en GCP et APP :
- La mise en place d’une dynamique de confiance. Les étapes de contractualisation comme les régulations produites par l’animateur sont de nature à sécuriser l’espace et le temps du travail. La dynamique de groupe qui en découle favorise l’élaboration d’un climat de confiance et ainsi l’écoute et la prise de parole qui composent et rythment les différentes étapes.
- Les modalités d’apprentissage. Comme nous l‘avons précisé sous 4.1, l’altérité est au cœur des processus d’apprentissage. En GCP comme en APP, la structuration du groupe en un collectif constructif est un facteur décisif. C’est dans la co-élaboration en cours de séance d’interactions fécondes entre participants que se construisent les apprentissages, l’élargissement de leur compréhension en regard de leurs pratiques et … l’élaboration de nouvelles perspectives potentielles d’action.
En ce qui concerne les interactions de groupe :
Plusieurs aspects peuvent être relevés, que l’on retrouve tant dans les approches du GCP que de l’APP, qui y portent toutes deux une attention particulière : travail de constitution du collectif (par des activités de mise en lien) ; développement du climat, de la sécurité et de la confiance entre les membres du groupe (par le cadre, les principes partagés, l’accueil des besoins et vécus de chacun) ; soutien de la croissance du groupe et de la reconnaissance des diverses représentations et émotions à la fois individuelles et groupales ; apprentissage et valorisation de l’intersubjectivité et de l’altérité ; développement des capacités communicationnelles (écoute, expression sans jugement, questionnement ouvert, circulation fluide de la parole, etc.).
En ce qui concerne l’intelligence collective (IC) :
Nous avons proposé dans un article récent, de la définir comme « l’émergence d’un « plus » lié aux interactions entre les individus participant au collectif » (Thiébaud & Vacher, 2018). « Les apports de tous les participants conduisent à ce qu’individuellement et collectivement les analyses réalisées par chacun soient inédites, en ce sens qu’elles sont le fruit des interactions singulières et imprévisibles des membres du groupe. [… Elles] constituent une plus-value du type 1+1=3 » (Vacher, 2018, p. 6). L’IC est donc un processus en émergence, non programmable, auquel contribuent un certain nombre de dynamiques spécifiques. En APP, Thiébaud (2018) en relève six qui nous semblent pouvoir aussi apparaître dans une certaine mesure en GCP :
- Développement d’un sens partagé en lien avec la démarche. Ce processus renvoie à la compréhension développée par les membres du groupe par rapport au travail entrepris en tant que démarche collective et par rapport aux objectifs poursuivis.
- Co-élaboration de focus de travail en lien avec la pratique exposée. La pratique analysée « focalise l’attention de tous. Elle devient objet concret pour l’analyse et le développement de l’intelligence collective, qui s’en trouve facilitée. » (Thiébaud, 2013, p. 65).
- Présence, ouverture, écoute, questionnement des personnes au sein du collectif. Cette dynamique comporte trois facteurs : un fort engagement des participants sous plusieurs formes ; un partage d’émotions dans le groupe ; un questionnement et un apprentissage personnel. Aussi une attitude empathique, non-jugeante.
- Reliance et interconnexion. Cette dynamique se fonde sur : des processus d’empathie et de compréhension réciproque ; une élaboration en commun de l’analyse ; des phénomènes de résonance sur les plans autant affectif, qu’intuitif et cognitif ; un accueil des différences, des décalages, des surprises, d’éléments de controverse ; une dialectique entre le semblable et le différent ; une suspension du débat (sans recherche de consensus).
- Autorégulations, compétences et conscience collectives. Cette dynamique a trait à la manière dont le groupe développe une capacité à conscientiser et réguler son propre fonctionnement.
- Co-créativité. La liberté ressentie favorise une autorisation / auteurisation[6] des participants qui leur permet d’explorer un espace collectif de créativité et de co-construction.
Ces dynamiques se développent progressivement avec l’évolution du groupe et dans la mesure où l’animateur les favorise. A cet effet, celui-ci peut notamment encourager les participants à conscientiser leur fonctionnement et leurs compétences en tant que collectif et privilégier des interventions d’accompagnement et de régulation qui mobilisent leurs ressources. Il peut solliciter la capacité de réflexivité des participants dans des méta-analyses et veiller à œuvrer avec l’émergence, en étant attentif aux potentialités présentes à chaque moment et en explicitant la visée et les processus de travail en intelligence collective. Ces régulations de l’animateur se font au rythme des participants et en apportant une attention particulière à leurs souhaits, capacités et disponibilités du moment.
Les dynamiques de groupe et l’intelligence collective sont donc au cœur d’un système complexe que constituent les séances (ou les séquences de séances). L’APP et le GCP présentent de nombreuses similitudes ainsi que quelques différences, en particulier en ce qui concerne l’IC et les six dynamiques évoquées.
Dynamiques de groupe et d’intelligence collective dans les deux démarche
Similitudes | Différences | |
Constitution du groupe | Développement de l’identité du collectif, de la sécurité, d’un cadre, de principes et d’objectifs partagés | |
Interaction de groupe | Développement de capacités communicationnelles et d’une circulation de la parole favorisant les échanges |
GCP : partage entre participants, sans débat, de tout ce qui peut aider le client (les interactions s’adressent au client, pas directement aux autres participants/consultants) APP : partage et échange entre participants, sans visée de consensus, et mobilisation régulière d’un travail en commun de co-construction |
Travail en intelligence collective (en lien avec les six dynamiques) | Développement d’un climat d’ouverture susceptible de favoriser l’émergence de l’IC. |
GCP : variable ; IC non explicitement visée APP : échanges co-constructifs visés dans les étapes 3 et 4 APP : travail sur des apports en rebonds, dans la reliance, et identification de questionnements collectifs APP : régulations et temps « méta » visant la mise en mouvement des dynamiques d’IC |
Rôle de l’animateur | Facilite par la contractualisation et ses interventions le développement d’une dynamique de groupe favorable à la démarche d’accompa-gnement ou de consultation et aux apprentissages |
GCP : favorise les mutualisations dans le groupe APP : en plus de favoriser les mutualisations, il saisit les opportunités pour stimuler les six dynamiques d’IC |
… |
Tableau 6 : similitudes et différences dans les dynamiques de groupe et d’IC
5.2. Discussion : complémentarités, risques, bénéfices qui peuvent découler d’une intégration des apports mutuels de chaque démarche
Ceci va de pair avec l’importance accordée au travail de questionnement et d’apprentissage collectif par rapport aux apprentissages individuels. Dans l’APP, nous précisons parfois que le récit de l’exposant est un support qui est « prêté » au groupe pour travailler l’analyse et la réflexivité en groupe (ainsi que l’IC). Cet objectif s’ajoute donc à l’objectif d’accompagnement de l’exposant. Cela renvoie à plusieurs interrogations. Le groupe est-il uniquement ou prioritairement au service du client/exposant ? Comment la réciprocité de l’accompagnement s’établit-elle ? Ce processus de mutualité est-il un phénomène incident ou recherché et finalisant ?
En GCP comme en APP, l’intention est de valoriser la coprésence et donc la réciprocité. Cependant, cela peut prendre des formes qui privilégient plus ou moins l’élaboration d’apports et d’apprentissages individuels ou/et en co-construction collective. Dans la mise en œuvre de chaque approche, un équilibre différent peut être développé, qui est susceptible de varier aussi en fonction des besoins et des objectifs du groupe.
Outre les questions du temps à disposition et des objectifs visés, cela interroge aussi la manière dont se construit la dynamique collective et le rôle de l’animateur à cet égard. Quelles capacités dans le groupe peuvent y contribuer ? Quelles motivations sont présentes chez les participants ? Comment rester en connexion, au diapason, pour travailler en intelligence collective, quand se mélangent différents niveaux d’analyse et de pistes d’action ? Quelles régulations peuvent s’avérer nécessaires à cet effet ? Par exemple, dans quelle mesure une logique plutôt ordonnée peut-elle favoriser la progression de l’analyse collective, en la complexifiant, en passant peu à peu à un niveau plus « méta » progressivement… avant une synthèse et le choix d’objectifs (que peut se fixer l’exposant), lesquels seront ensuite travaillés par le groupe dans une recherche d’options, de ressources à mobiliser et finalement dans la formulation d’un plan d’action ? Des différences et complémentarités au niveau de cette progression de la réflexion peuvent être ici aussi trouvées entre le GCP et l’APP telle que nous l’avons présentée.
Mise en lien et conclusion : portée et limites de cette mise en perspective
Dans cet article, nous avons mis en perspective les éléments du GCP et de l’APP qui nous semblaient les plus marquants. A cet effet, notre avons porté notre attention sur cinq aspects : 1) le dispositif général, les principes et les objectifs, 2) le déroulement des étapes des deux démarches, 3) la place qu’elles donnent à l’analyse et l’action, 4) les formes et leviers d’apprentissage et 5) les dynamiques de groupe et d’intelligence collective mobilisées. Cette mise en perspective, qui demeure non exhaustive, nous conduit à considérer que les similitudes sont plus nombreuses que les différences.
Cependant, nous nous sommes référés pour ce travail à des modalités spécifiques du GCP et, particulièrement, de l’APP. Avec d’autres approches, notamment en analyse de pratiques, on peut imaginer que nos observations auraient montré d’autres résultats, et possiblement des différences plus importantes. De plus, à l’intérieur même des deux approches étudiées, une prise en compte de diverses variantes dans leur mise en œuvre amènerait à nuancer certaines similitudes et différences mises en évidence.
Au terme de cette analyse, nous pensons que les deux démarches gagneraient à être davantage utilisées en complémentarité. Cela peut se faire pour une partie ou l’autre selon diverses formes d’hybridations que nous avons évoquées. Possiblement aussi en alternance, d’une séance à l’autre, selon des objectifs qui peuvent être plus ou moins accentués. Il est également possible d’envisager une forme de continuité, un groupe pouvant choisir de commencer avec une démarche de codéveloppement professionnel et développer ensuite un travail plus orienté vers une analyse de pratiques avec une visée d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité … ou inversement.
Si de telles utilisations en complémentarité peuvent être fructueuses, elles nous semblent devoir être déployées en fonction de la maturité du groupe, des capacités et des souhaits des participants. En effet, avec le temps et l’évolution du groupe, la sécurisation de l’espace relationnel s’accroît et avec elle, apparaissent des possibilités de flexibilité dans le fonctionnement.
La méthode (par expérimentation) et les cinq axes de comparaison utilisés pour cette mise en perspective semblent profitables pour une telle étude. Ils gagneraient sans doute à être employés également pour comparer le GCP et l’APP à d’autres démarches de groupe plus ou moins proches telles que les ateliers réflexifs, l’action learning, la supervision de groupe, ou encore l’échange de pratiques (voir Thiébaud, 2020a, 2020b).
Pour terminer, mentionnons que d’autres éléments de mise en perspective auraient bien sûr pu être explorés. Pensons aux avantages de chaque démarche (en termes par exemple de résultats, de simplicité de mise en œuvre, etc.), aux visées formatives privilégiées, aux évolutions possibles du travail sur une longue durée, aux questions relevant de la formation de l’animateur, etc. que nous avons à peine effleurées.
C’est dire que ce champ d’études, encore peu exploré, mérite d’autres développements dans le futur !
Annexe
Trois éléments clés d’une analyse de pratiques mettant l’accent sur l’accompagnement, l’intelligence collective et la réflexivité
Voir pour davantage de précisions :
Thiébaud, M. & Vacher, M. (2020). L’analyse de pratiques professionnelles dans une perspective d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité. In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 18, pp. 43-69. http://www.analysedepratique.org/?p=3716.
- Accompagnement par le questionnement et recherche en commun en lien avec les pratiques[7] vécues: l’accent est mis sur la manière dont peuvent être problématisés les éléments exposés, les représentations à l’œuvre, les grilles de lecture utilisées, par une réflexion visant à élucider plutôt qu’à résoudre ce qui est apporté par l’exposant (ou le client). Celui-ci est accompagné par le groupe dans l’élaboration et la mobilisation de ses ressources.
- Dynamique et intelligence collectives: les questionnements et réflexions développés se fécondent mutuellement dans une démarche qui multiplie les éclairages, puis cherche à les relier en valorisant toutes les ressources présentes. L’intelligence collective dans cette approche permet l’émergence de l’inédit et de plus-values qui vont au-delà des apports de chacun. Selon les termes de Vacher (2018), celles-ci sont « du type 1+1 =3 », le « 3 » correspondant au fruit d’une co-construction. Le groupe développe cette capacité progressivement (voir Thiébaud, 2018).
- Réflexivité et regard « méta» : la démarche favorise simultanément la prise de recul sur soi, sur le fonctionnement du groupe, sur les analyses produites et sur la manière dont elles ont été développées. À cet effet, des temps « méta » sont proposés à différents moments qui ne se limitent pas au seul temps de bilan en fin de séance (voir Thiébaud & Bichsel, 2019). En développant progressivement cette pratique, les participants dans le groupe acquièrent une capacité de prise de du recul, de prise de conscience de leur cadre de référence et modèle d’action dans une perspective d’approche multiréfléchie (Vacher, 2015).
Chacun de ces éléments est stimulé et entretenu, dans une temporalité qui englobe et dépasse celle de la séance. Dans la logique expérientielle des apprentissages et du développement qui est au cœur de la démarche (voir Kolb, 1984), la séance d’APP constitue un temps réflexif dans une continuité. Un processus de maturation se produit ainsi après une séance d’analyse de pratiques ; l’exposant (le client) et poursuit ses réflexions, élabore de nouvelles actions et expériences, qu’il pourra rapporter au groupe lors d’une séance ultérieure (voir Thiébaud, 2013). Cette inscription dans la durée concerne les vécus individuels des participants et l’ensemble du groupe, qui développe progressivement ses processus de travail et ses compétences collectives.
Dans le champ de l’APP, cette approche peut être située de la manière suivante (en reprenant des éléments de différenciation proposés par Thiébaud, 2020b)
- Finalités : développement professionnel et évolution de la pratique.
- Contexte et destinataires: groupe ou équipe de professionnels ; accompagnement de la pratique et formation continue avant tout (parfois formation initiale).
- Ce qui est plus particulièrement mis en travail : les pratiques et la réflexivité.
- Objectifs privilégiés : multiples bénéfices possibles, avec des objectifs spécifiques parfois contractualisés avec les participants en amont, parfois régulés en cours de route.
- Référentiels utilisés: aucun privilégié, travail dans la multi référentialité, selon les ressources présentes dans le collectif.
- Méthodes et modalités: variées, favorisant la mobilisation des ressources cognitives, émotionnelles et créatives présentes et valorisant les dynamiques d’intelligence collective et de co-construction (fécondation mutuelle entre les apports des participants).
- Animation : dans une recherche d’équilibre entre le cadre de travail défini et l’émergence des potentialités au sein du collectif ; régulations continues des processus avec les participants.
Références bibliographiques
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Bateson, G. (1995). Vers une écologie de l’esprit. Paris : Le Seuil. Tome 1 (1ère édition 1977).
Blanchard-Laville, C. (1998). L’apport du groupe d’inspiration Balint aux enseignants et aux formateurs d’enseignants. Travail psychique et professionnalité. In C. Blanchard-Laville & D. Fablet. Analyser les pratiques professionnelles. Paris : L’Harmattan,
p. 27-55. https://www.cairn.info/revue-de-psychotherapie-psychanalytique-de-groupe-2008-1-page-33.htm.
Champagne, C. (2020). Le groupe de codéveloppement professionnel. In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 18, pp. 24-42. http://www.analysedepratique.org/?p=3721.
Kolb, D. (1984). Experiential learning: Experience as the source of learning and development. Englewood Cliffs, N.J.: Prentice Hall.
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Morin, E. (2005). Introduction à la pensée complexe. Paris : Éd. du Seuil.
Payette, A. & Champagne, C. (1997). Le groupe de codéveloppement professionnel. Ste-Foy : les Presses de l’Université du Québec.
Revans, R. W. 1982. The origin and growth of action learning. Brickley, UK: Chartwell-Bratt.
Rogers, C. (1968). Le développement de la personne. Paris : Dunod.
Schön, D. A. (1983). The reflective practitioner. New York, NY : Basic books. (Le praticien réflexif. Montréal : Les Editions Logiques, 1994).
St-Arnaud, Y. (2003). L’interaction professionnelle. Les Presses de l’Université de Montréal.
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Thiébaud, M. (2020a). Analyse de pratiques <-> échange de pratiques. Quels points communs ? Quelles différences ? Quelles complémentarités ?
In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 16, pp. 51-80. http://www.analysedepratique.org/?p=3629.
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Thiébaud, M. & Vacher, M. (2020). L’analyse de pratiques professionnelles dans une perspective d’accompagnement, d’intelligence collective et de réflexivité.
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Thiébaud, M., Vacher, Y., Champagne, C. & Desjardins, M. (coord.). (2020).
Groupes d’analyse de pratiques et de codéveloppement professionnel.
In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, Numéro thématique 18. http://www.analysedepratique.org/?p=3765.
Vacher, Y. (2014). Phase méta en APP… quels contenus, quelles fonctions ?
In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 4, pp. 23-34. http://www.analysedepratique.org/?p=1379.
Vacher, Y. (2015). Construire une pratique réflexive. Bruxelles : De Boeck.
Vacher, Y. (2018). 1+1 ça fait combien en APP ? Effets possibles du groupe sur la dynamique de l’analyse. In Revue de l’analyse de pratiques professionnelles, 12, pp. 4-12. http://www.analysedepratique.org/?p=2864.
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Notes
[1] Marc Thiébaud a élaboré au cours des vingt dernières années diverses formes d’accompagnement individuel et collectif. Le développement de la capacité à réfléchir à sa pratique et à mobiliser des processus de coopération au sein des collectifs est au centre de ses intérêts. Ceci l’a conduit à proposer différentes modalités de travail en particulier en APP (Thiébaud, 2001 ; 2003 ; Thiébaud & Bichsel, 2015). Yann Vacher a quant à lui travaillé depuis quinze ans à la conception de dispositifs en formation initiale des enseignants. Il y développe des stratégies pour faciliter la construction d’une pratique réflexive. Le dispositif ARPPEGE (Analyse Réflexive de Pratiques Professionnelles En Groupe d’Echange) a été conçu pour répondre à ce défi (Vacher, 2015).
[2] Nous invitons les lecteurs à garder à l’esprit notre remarque préalable sur la complexité des phénomènes et des ajustements produits par l’animateur dont les éléments macroscopiques présentés ici ne peuvent rendre compte.
[3] Nous reviendrons plus en détail dans le point 3 sur la place de l’analyse et de l’action dans le GCP et dans l’APP.
[4] « Constructive » parce que l’activité participe à la transformation de l’identité professionnelle et « productive » parce qu’elle est orientée vers l’action et ses évolutions.
[5] Voir Thiébaud & Vacher, 2020 (chapitre 4.4) pour la différence entre les processus de mutualisation et de co-construction.
[6] Ardoino (1992) développe l’idée que lorsque les conditions sont favorables, l’acteur peut s’autoriser à s’engager et devenir ainsi auteur, c’est à dire créatif.
[7] La pratique est plus qu’une situation ou une activité. « Celle-ci est à comprendre comme un ensemble d’activités, de vécus, de représentations, de modèles de pensée et d’actions élaborées par la personne dans la singularité de son contexte et de sa subjectivité. En APP, la pratique analysée correspond à ce que la personne apporte au groupe » (extrait de Thiébaud & Vacher, 2020).